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  • : Le blog de l'A.T.F.S.
  • : Le site web de l'association de thérapie familiale systémique - Caen (14)
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J’ai rencontré Michel C. lorsqu’il a intégré le groupe de thérapie à la prison de Caen, en 2000, peu de temps avant sa sortie. Je l’ai accompagné ensuite lors des visites médiatisées avec son fils jusqu’en 2004. Il m’a donné par la suite régulièrement de ses nouvelles. Et j’ai demandé tout récemment à le revoir pour qu’il me raconte tout son parcours, depuis son enfance. Nous avons eu trois entretiens successifs en deux mois. J’ai respecté dans cette retranscription le style oral et l’intégralité de ses propos. J’ai seulement réorganisé son discours de manière à respecter le plus possible la chronologie des événements. Les propos de Michel C. apparaissent en italique, contrairement à mes commentaires et précisions. Afin de respecter l’anonymat de cette personne et de sa famille, tous les noms et lieux ont été modifiés. Dans cette famille, Michel est le dernier d’une fratrie de 5 enfants, 2 filles aînées, Elisabeth et Claudine, puis 3 garçons, Lucien, Alain, et Michel.

Mon plus ancien souvenir ? Mon père, je me rappelle pas. Ça commence en fait quand j’ai 7 ans, quand ma mère a déménagé. On a habité en pleine campagne. C’est là que ça débute, mes souvenirs. Ma sœur aînée (Elisabeth) avait mangé le capital décès à ma mère. Et on s’est retrouvés sans argent, sans rien. Pas de moyens de locomotion, rien. J’ai aucun souvenir avant. Là où ça a commencé vraiment, moi et mon frère Alain, on a crevé de faim, c’est le cas de le dire. C’est pour ça que maintenant je ne peux pas entendre parler de concombres. On mangeait des concombres crus. On mettait du vinaigre sur du pain pour manger. On a vécu là-bas une année terrible. Chaque fois qu’on en parle avec mon frère, il pleure.

Mon autre sœur (Claudine) était pas au courant de ce qui se passait. Elle ne pouvait pas intervenir. Elle était déjà mariée, et mon autre frère (Lucien) était en apprentissage, il mangeait le midi chez son patron. Alors, il a pas tellement souffert de la faim. Et ma mère, elle voulait rien dire.


Ma sœur aînée, Elisabeth, habitait tout près de chez nous. C’était pas pour rien qu’elle avait fait venir ma mère. Elle s’occupait de récupérer le capital de décès. Elle, elle avait tout le confort, et elle nous laissait crever la dalle. C’est pour ça qu’on a quand même une rancœur contre elle. C’est moi et mon frère qui avons dérouillé le plus. Ma mère, elle allait manger le soir à Avranches avec ma sœur aîn
ée.

Je lui en veux tout le temps. Je ne lui souhaite pas de malheur, mais c’est resté gravé. À partir de là, on a revécu normalement quand on est revenus à Vire. Ma sœur Claudine s’est aperçue qu’on n’avait pas à manger. Elle avait son fils Roger qui était tout bébé. Elle est venue demander à ma mère de le garder. Elle s’est aperçue qu’il n’y avait rien à manger à la maison. C’est ça qui a tout déclenché. Et elle nous a trouvé un appartement en ville, quand elle a appris qu’on mangeait rien. J’en étais arrivé que je vomissais du sang à force de rien avoir dans l’estomac. Et quand on allait à l’école, c’était une toute petite école de campagne, mon frangin voulait surtout pas que j’en parle. Il disait : tu dis rien, tu dis rien ! J’écoutais le grand frère, mais nos deux maîtres se sont aperçus qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. Un soir, en partant, le mien m’a attrapé par le bras. Il a attendu que mon frère sorte. Ils nous ont gardé tous les deux et ils sont allés nous chercher un casse-croûte. Ils s’étaient aperçus que y avait quelque chose qui n’allait pas. Ça aurait été maintenant, on aurait été à la DASS. On partait à coup sûr à la DASS. Mon frère était gêné. Il voulait pas qu’on en parle. Alors, on n’en parlait pas. Mais les profs s’en sont aperçus…

J’entends parler de mon père dans la famille, mais même à partir des photos que j’ai, là sur le mur, ça ne me dit rien de lui.

Je n’ai pas d’image de lui dans ma tête. Ma sœur (Claudine) m’a parlé de lui, ma mère, très peu. Il avait été déporté. Il est rentré dans les F.F.I. Après, il a participé au sabordage de la flotte de Toulon. Tout ça, c’est ce qui s’est passé pendant la guerre, puisqu’il était dans la marine. Après, il est devenu livreur. Et il a travaillé dans une scierie, je crois. Quand il habitait en campagne, et qu’il était livreur, ça allait. Mais quand il est arrivé en ville, en HLM, peut-être le fait de ne plus avoir de jardin à faire, il s’est mis à boire. Mais il était pas violent du tout avec ma mère, avec les enfants non plus. Il s’était mis à boire. Après, il a eu une sorte de cancer généralisé, ce qu’il n’a pas supporté. Et il a préféré se supprimer. Mais on n’a jamais su exactement ce qui s’est passé. J’étais assez jeune à ce moment-là. Rien que pour l’enterrement, ils m’avaient tenu à l’écart, moi et mon frère Alain. Je me rappelle vaguement. Je me doutais qu’il se passait quelque chose mais je ne savais pas du tout que mon père était mort, ni le jour pour l’enterrement. On ne m’a jamais dit qu’il était mort. Je l’ai compris tout seul après qu’on ait déménagé. C’est après qu’on a connu la disette.

Lorsque je demande à Michel C., en tout début d’entretien, de commencer par son plus ancien souvenir, il est frappant de constater que ses premiers mots sont pour parler du père et de l’absence de souvenirs du père. Il parle plus loin du suicide du père et de l’absence de toute information de la part de la famille, sans doute dans le but de le protéger. C’est là pourtant le signe d’un traumatisme initial important, la mort violente du père lui faisant effacer tout souvenir de la proximité avec lui. La souffrance de la privation du père se trouve masquée, et en même temps aggravée, par la souffrance psychologique et la menace sur sa santé physique et sur sa vie pendant la période de privation imposée par la sœur aînée.

Quand on est revenus à Vire, j’aimais pas l’école. Mais à la maison j’aimais bien dessiner et faire des maquettes. Je ne compte plus le nombre de maquettes que j’ai fait. C’est une passion. Ça a commencé j’avais 8 ou 9 ans. Je me rappelle bien les dates, parce que je me repère à où on se trouvait. Les maquettes, c’était l’envie de construire, de créer. Mais avant, j’aimais bien créer et détruire aussi. Faut le faire, ça ! Parce que mes maquettes, je les faisais exploser, des trucs comme ça. Je ne le fais plus maintenant . Ça s’est calmé.

En prison, j’avais fait la maquette d’une fusée, avec des bouts de carton, des tubes et des allumettes. Après, je l’ai donnée à Laurent (son fils). Mais je pense qu’elle ne doit plus exister maintenant. Ça a du partir en morceaux. J’avais construit ça pour occuper le temps, et j’aime bien créer. Là, j’en ai une en attente mais ma sœur a fait du nettoyage. Elle a tout foutu en l’air quand j’ai changé d’appartement, pendant que j’étais à l’hôpital. Elle a vidé l’appartement et elle a mis les maquettes en l’air. J’ai pas trop apprécié. Mais c’est comme ça ! Elle aurait pu les donner à un gamin, il se serait amusé avec, mais tant pis ! Mais sinon, j’aime bien créer. Là, je me lance dans la peinture. (il me montre un tableau en cours de réalisation) C’est une image que j’ai tirée du film les 10 commandements à la télé. J’ai mis sur pause. La peinture, c’est plus compliqué que le dessin. Des dessins, j’en ai fait beaucoup. Quand j’étais en prison, j’en ai fait toutes les semaines, que j’envoyais à ma frangine. Elle les a tous gardés. Le dessin, ça a toujours été mon passe temps. Depuis 68, et c’est grâce à mon frère que je me suis mis à dessiner. C’était un calendrier de la poste avec Blanche Neige et les 7 nains, et mon frère, pour pas que je le suive, parce que je le suivais tout le temps, il m’a dit : tiens, dessine ça. C’est comme ça que m’est venue l’idée de dessiner.

Et c’est peut-être là que je vais commencer à vous choquer. J’étais déjà à cette époque là porté sur le sexe. J’avais 11-12 ans. Je regardais les filles, parce que je me découvrais en même temps. J’étais précoce. La curiosité ! Parce qu’on ne nous expliquait rien. Là, on est restés un an, place du Marché, et après on a habité ailleurs. Et j’ai commencé à déraper. J’ai connu l’homosexualité, quand je devais avoir 14 ou 15 ans. Je recherchais les filles, mais j’étais repoussé à cette époque-là. J’avais du mal à m’avancer vers les filles. Une fois, j’ai demandé à une fille pour venir voir un film avec moi au cinéma. Elle était d’accord, mais quand je me suis mis à rigoler, elle s’est aperçue que je n’avais plus de dents. Elle l’a dit à toutes ses copines. Je suis rentré. J’étais plutôt détruit comme dirait l’autre. Alors, j’ai fait une fixation là-dessus. Je me suis dit en moi-même : jamais je ne trouverai de fille, ni rien. Et y a eu cette histoire de copain qui m’a endoctriné. Je sais pas si on peut dire ça comme ça. Et on a eu, pas des gros rapports sexuels, mais des attouchements, des fellations, des trucs comme ça… C’est pas facile d’en parler ! Mais c’est quand même contre-nature !

Les dents, c’était l’assistante sociale, parce que j’avais des dents très abîmées. Et comme ma mère ne les avait pas faites soigner, l’assistante sociale a du trouver bon de me faire arracher toutes les dents de devant pour avoir un appareil. Mais ma mère a pas eu les moyens de l’achat d’un appareil, parce qu’à cette époque-là, c’était pas pris en charge comme maintenant. Alors, je suis resté sans dents, depuis l’âge de 14 ans. J’ai eu un appareil en prison. J’en ai eu un aussi ici, mais c’était des appareils bas de gamme qui ne tenaient pas. Alors, j’ai préféré rester sans dents. Maintenant, j’y pense plus, mais à cette époque-là, j’y pensais tout le temps. Alors, quand on sortait avec des copains, je me planquais toujours et je m’arrangeais pour qu’on ne me voie pas. Humilié, frustré. On voyait bien que j’étais pas comme les autres. Les autres, ils rigolaient tout le temps.

L’école ? Au début, j’y allais quand j’avais le temps, et la dernière année, au CES, ils m’ont pratiquement jamais vu. J’ai en fait quitté l’école à 15 ans. J’étudiais quand même. Je m’étais fabriqué mon école moi-même. Y avait des décharges de papeterie à cette époque-là. Maintenant, y a plus rien. Mais ils déversaient des feuilles, des livres, des trucs comme ça. Alors, j’avais trouvé deux grands bidons. Je mettais une grande planche dessus, en travers, et un petit bidon pour m’asseoir, et puis je bouquinais là, surtout des livres d’histoire, de géographie, tout ça… Ça me plaisait. J’étais bien, j’étais dehors, dans mon école que je m’étais fabriquée moi-même. Je supportais pas l’école, mais là, ce que j’ai appris, j’ai appris pas mal de trucs, c’était une école buissonnière ! J’apprenais quand même, quoi ! J’étais bien, j’étais tout seul.

De toute manière, à l’école, je restais toujours dans mon coin. Je ne pouvais pas me mélanger au groupe. Y avait rien à faire. Ce serait maintenant, sûrement que les profs diraient : c’est bizarre, il faut faire quelque chose pour lui. Mais à ce moment-là, les profs sont seulement venus dire à ma mère qu’il fallait m’obliger à venir en classe.

L’école s’est manifestée. Y a deux profs qui sont venus à la maison. Y avait Mme Lenoir, qui a dit à ma mère qu’on ne me voyait jamais. Ma mère était persuadée que j’y allais. Mais je faisais le tour et je repartais à la décharge. Alors, elle, elle me voyait partir, elle se disait : il est parti à l’école. Mais j’y allais pas. Après, il y a le prof d’atelier qui est venu. Là, ça a commencé à chauffer pour moi, et après, j’ai eu encore l’assistante sociale qui m’a trouvé une place aux Orphelins apprentis d’Auteuil, à Chartres. Mais quand je me suis vu là-dedans, je m’en doutais que j’allais pas tenir. On était, je me rappelle plus, je crois 600 en interne. J’ai tenu trois semaines et je me suis tiré. La première fois, je suis parti un samedi. Je suis revenu chez ma mère. J’avais attendu que tout le monde soit rentré pour aller manger et je suis parti avec un gars qui supportait pas l’école non plus. Seulement lui, il avait que 25 km à faire pour rentrer chez lui. Moi, il m’en restait beaucoup plus à faire. Je suis rentré en stop. La deuxième fois, c’était un jeudi. L’Assistante sociale m’avait ramené et elle m’avait demandé de tenir 2 semaines jusqu’à Pâques. Elle m’a ramené le mercredi. Le jeudi, je suis reparti.

Je me demande toujours pourquoi le sexe ? Je me suis vengé sur le sexe. C’est comme une sorte de vengeance. C’est là que j’ai connu l’homosexualité, je pensais que j’aurais jamais de fille. Après, j’ai eu des problèmes avec ma nièce. Alexandra, ça a commencé quand elle habitait en campagne à St Germain, et je m’amusais à la tripoter en chahutant, et elle venait vers moi. C’est pour ça, quand elle rentrait de l’école, elle passait chez ma mère. Sa mère venait la récupérer après. Et je chahutais avec elle. Et quand elle allait aux WC, elle m’appelait : « Tonton, tonton ! » et voilà ! je continuais, des caresses. Je devais avoir 15 ou 16 ans. Plus tard, à 20 ans, y a eu fellation. J’aurais du payer pour ça. Mais c’est resté en silence.

C’est dur d’en parler, parce que là, y a pas d’autre mot, c’est pervers, y a pas de problème ! Et fixé comme ça sur le sexe, c’est… Y avait que ça qui comptait. Pourquoi ? J’en sais rien. Je me demande encore pourquoi le sexe. Pourquoi pas autre chose, comme le vol par exemple, ou un truc comme ça. Etre porté sur le sexe comme j’étais, c’était incroyable. C’était des pulsions. Masturbation, surtout.

Y a eu Alexandra, oui. Mais c’était elle seulement. Avec ses soeurs, il ne se passait rien. Il n’y avait qu’elle qui venait me chercher. Elle s’allongeait sur le lit et elle se caressait. Des trucs bizarres, quoi ! Et moi, je résistais pas. Je sais plus quel âge elle avait, mais elle était toute jeune, elle devait avoir 6 ans quelque chose comme ça. Alors, après, j’allais m’enfermer dans les WC, je me masturbais. Et après, je regrettais d’avoir fait ce que j’avais fait. Et à chaque fois, je me laissais prendre à mon propre piège. C’est arrivé assez souvent. Une dizaine de fois ou une quinzaine de fois peut-être. C’était en 75. J’avais 16 ans.

Tout ça, c’est à l’époque des Orphelins apprentis d’Auteuil. J’avais quitté l’école. Les Orphelins d’Auteuil, c’est la goutte qui a fait déborder le vase. On était 600 au château. Je ne supportais pas. Y avait trop de monde, et je ne supportais pas d’être éloigné de ma famille. Et j’avais l’impression d’être puni, rejeté. Pendant ce temps-là, mon frère Alain était apprenti charcutier. Il en a fait son métier.

Le fait que Michel C. parle de « vengeance » est bien intéressant. On peut en effet faire l’hypothèse que les abus commis sur Alexandra, qui est une des filles d’Elisabeth, ont quelque chose à voir avec une vengeance en réponse aux privations imposées à Michel et à Alain. Ce qui, bien sûr, n’excuse en rien les abus commis

Mais cela ne permet pas d’accréditer le diagnostic de perversion qu’il s’attribue lui-même. Les sentiments de honte et de culpabilité qui l’habitent encore aujourd’hui, le désir de réparation qu’il a manifesté au cours de son incarcération, permettent de considérer que si les actes commis sur Alexandra, puis plus tard sur sa fille Brigitte, sont certes des actes pervers, car le fait d’utiliser des enfants pour obtenir une satisfaction sexuelle est un acte pervers, l’auteur de ces actes ne présente pas pour autant une structure de personnalité perverse. L’évidente immaturité de Michel C., son sentiment de dévalorisation personnelle, sa dépendance à son frère et à sa sœur, les traumatismes subis dans l’enfance, le situent, s’il faut à tout prix poser un diagnostic, parmi ceux que Roland Coutanceau nomme des « immaturo-névrotiques », pour qui les risques à venir se situent plus dans la dépression que dans la récidive.

Et il est important de noter que Michel C. , auteur d’agressions sexuelles, n’a pas subi lui-même d’agression sexuelle, mais les traumatismes psychologiques et physiques subis ont eu une influence déterminante sur sa construction personnelle, influence aussi violente, et peut-être même plus violente que s’il avait subi des traumatismes de nature sexuelle.

Mon autre frère, Lucien, lui, il avait été accusé de viol, avec ses copains. Ils étaient trois en tout. Et on a appris que c’était un autre type qui leur envoyait la fille. Après, elle portait plainte et elle touchait des dommages et intérêts. Au tribunal, c’est ça qui l’a sauvé pour ainsi dire, mon frère, et tous les trois. Les juges ont demandé à la fille de montrer qui l’avait violée. Et elle a montré l’avocat ! Ça a mis tout par terre. Mais, elle avait pas toute sa tête. Par la suite, on a su qu’elle avait encore porté plainte pour viol. Ça a semblé bizarre à la justice. Mon frère a donc pas été condamné. Il a du faire 15 jours de prison préventive. Après, il s’est tenu à carreau. Il ne sortait plus, sauf avec un seul de ses copains. Maintenant, il est dans un établissement pour tous ceux qui ont des problèmes d’alcool. Il a atterri là-bas. Avec l’alcool, il est ingérable. C’est l’alcool, l’alcool. Il pense qu’à ça !

Moi aussi, j’ai eu des problèmes avec l’alcool, j’ai commencé l’alcool vers 17 ans. La bière d’abord, et après des alcools plus forts. À 16-17 ans, j’ai travaillé avec mon frère. On a été pris dans un chantier pendant 6 mois dans la région. Mon frère est reparti charcutier après. Moi, j’ai été paysagiste, en interim, en SIVP 6 mois de plomberie et aussi à Intermarché, mais pas longtemps parce qu’ils m’ont dit qu’il y aurait des cours, alors, j’ai laissé tomber. J’ai travaillé à la ville aussi. Beaucoup de petits boulots. Des petits boulots, toujours. Une place fixe, j’ai jamais eu. J’ai failli en avoir une en usine. On faisait des pièces métalliques. Alors là, c’était un boulot qui me plaisait. J’avais une machine à régler. J’avais bien compris dès le début. Ça me plaisait, mais je suis tombé sur un chef qui pouvait pas me voir. Il a pas renouvelé mon contrat. Mais là, c’est une boîte où je me plaisais.

Alors, à 20 ans, on vivait toujours mon frère et moi chez notre mère. Mon frère s’est quand même mis en ménage de bonne heure. Juste avant de partir à l’armée, mais il est pas parti parce que considéré comme soutien de famille et en plus il était pompier.

Moi, j’ai fait mon service militaire. C’est là que j’ai fait un acte que je paie cher, que j’ai payé cher et que je continue à payer cher, c’est avec ma nièce Alexandra. Là, j’ai été plus loin, beaucoup plus loin. Une fellation, c’est considéré comme un viol. Là, j’aurais du être condamné à cette époque-là. Mais ça a été passé sous silence. Mais c’est resté là, et ça me revient souvent. Je vais souvent sur sa tombe. Je lui avais demandé pardon. Elle m’avait rien dit. Mais soi-disant que pour sa famille si elle a mal tourné, « c’est de la faute de Michel ». Elle était dans la drogue, et l’alcool. C’est la fille d’Elisabeth, ma sœur aînée. On se parlait de temps en temps avec Elisabeth, mais on n’oubliait pas tout ce qu’elle nous avait fait. Alexandra, ils l’ont un jour retrouvée morte chez elle. On n’a pas su ce qui s’était passé. Mais on a dit que c’était la drogue. Elle avait plongé dans la drogue, incroyable. Alors, on pense que c’est ça. Mais la famille, ils se sont refermés sur eux-mêmes. On n’a pas pu savoir ce qui est arrivé. C’est sa fille qui l’a retrouvée morte chez elle.

La fellation ? Elle devait avoir 12 ans. Moi, j’avais 20 ans, j’étais au service militaire. Je m’en veux encore maintenant. J’aurais mieux fait de faire ce que je faisais d’habitude, aller dans les WC pour me masturber. Ça aurait évité pas mal de dégâts. Mais ce jour-là, j’étais venu chez ma sœur avec mon frère Lucien, et j’ai eu une pulsion, mais énorme ! J’avais envie de faire l’amour. Une envie incroyable. Et, je sais pas, c’est arrivé comme ça. Je sais que j’ai fait une énorme connerie, là. Ça aurait été mieux si j’avais été condamné là. Ça m’aurait refroidi. Ça m’aurait évité de refaire la même erreur, même si ça pas été la même chose avec Brigitte. Ça m’aurait évité de recommettre des gestes qu’on fait pas.

Le service militaire, dans l’ensemble, ça s’est bien passé. Bon, y a toujours le fait d’être enfermé dans une caserne. Mais j’ai fait mon temps normal. Après, c’est à 26 ans que j’ai connu Chloé. Mais c’est Chloé qui a pris contact avec moi. Elle, elle avait que 18 ans. On ne se parlait pas du tout. Je ne pensais plus du tout aux filles. Enfin, j’y pensais, mais je ne me faisais pas d’idées. Pour moi, je ne me voyais pas avec une fille. Mais c’est elle qui est venue me chercher. Mais elle, elle était majeure, c’était pas pareil. Mais moi, je voulais pas, je sais pas pourquoi. Il y a une autre fille, avant, qui avait voulu sortir avec moi. Mais j’ai refusé, mais je sais pas pourquoi j’ai refusé la première, mais la deuxième, elle a tellement insisté ! Elle m’a demandé d’aller la rejoindre auprès de la rivière. Elle partait à son boulot. Ça a commencé comme ça, et après on s’est mis ensemble. Mais au début j’en voulais pas. C’est elle qui est venue me chercher. Au début, c’était pas terrible. Après, c’était mieux, je m’entendais bien avec elle. Il faut dire qu’elle était portée sur le sexe aussi, alors ! Ça me convenait. Elle avait eu pas mal d’aventures avant. Et elle en a eu après. Elle m’avait mis dans la tête de faire ça avec une copine, elle voulait faire ça à 3. Elle avait des fantasmes bizarres. Elle voulait que je l’attache au lit, tout ça… Elle me reprochait de manquer d’idées !

Au début, elle vivait chez ses parents, et elle s’est fâchée avec eux. Après, elle est venue habiter chez ma mère. Et quand j’ai su qu’elle était enceinte, j’ai trouvé un appartement. Je travaillais à la ville, pendant 2 ans, et après, un an à la récupération des cartons et après, plus rien. Chloé a travaillé à Intermarché, et après, elle a arrêté et Brigitte est née. Ses parents me recevaient. Mais c’était un milieu différent. C’était pas le même monde. Y avait pas de culture. Y avait toujours des histoires, des histoires. Elle était portée sur le sexe, mais je voyais bien qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. Je lui ai demandé. Et elle m’a dit un jour que son père venait la rejoindre toutes les nuits. Mais, ça, je ne lui en parle plus parce qu’elle dirait : je ne t’ai jamais dit ça. C’est comme quand elle dit à Brigitte que je l’avais tapée. C’est pas vrai, je ne l’ai jamais tapée. Je l’ai attrapée par le colbac une fois, et je l’ai collée au mur, mais je n’ai jamais levé la main sur elle. C’est parce qu’elle me gonflait ! Elle rentrait de chez ses parents où y avait toujours des histoires. Moi, je voulais aller voir ma mère, mais j’avais pas le droit. Elle, elle avait le droit d’aller voir ses parents, elle y passait tout l’après-midi. Alors, un jour, j’ai pété un câble. J’y ai dit : j’ai le droit d’aller voir ma mère aussi. Oui, c’est pour te soûler, ceci, cela… C’est vrai que je buvais beaucoup à ce moment-là. Elle, elle fumait, mais elle prenait pas d’alcool.

Brigitte est née un après qu’on se soit mis ensemble. Elle est arrivée par accident. Laurent par contre a été voulu. Mais pour Brigitte, elle voulait pas prendre la pilule. Je faisais attention, mais une fois, j’ai pas du faire attention, et voilà ! Mais elle voulait pas prendre la pilule. À mon avis, je crois qu’elle voulait un enfant. Elle voulait quitter ses parents. C’était la seule façon d’y arriver. Laurent, par contre, il a été voulu par nous deux. Quand Brigitte est née, j’étais content parce que je pensais que jamais je serais père. Depuis tout jeune, je pensais que je fréquenterais jamais, que j’aurais jamais d’enfant. Je sais pas pourquoi. Est-ce que c’est pour ça que j’ai fait des bêtises ? je sais pas. Je voyais tous mes copains qui fréquentaient, des trucs comme ça, et même des gars que je ne connaissais pas. Je les voyais avec des filles et je me disais : c’est pas pour moi. Je me disais en moi-même que jamais je fréquenterais. Pourquoi ? J’en sais rien. Et puis, ça m’est arrivé dessus quand même et puis…

Il y a quatre ans entre Brigitte et Laurent. Avec les enfants, ça se passait bien, jusqu’au jour où j’ai dérapé. Elle devait avoir 8 ans, non même pas 8 ans, 7 ans. Je voulais faire un câlin avec ma copine. Mais elle voulait pas. Ça faisait 3 jours qu’elle voulait pas. Elle se refusait à moi. Je me suis levé, fauteuil, télé, masturbation, et Brigitte est sortie de sa chambre. Elle est venue auprès de moi. Il n’y a eu que des caresses. Mais tout en la caressant, je me suis aperçu que je faisais une erreur monumentale. mais bon ! c’était fait. Je repensais à Alexandra et j’avais peur que ça recommence. Je lui ai caressé les fesses, le sexe, tout ça. Mais ça n’a pas été plus loin. J’ai compris, oui et non. Ça a duré ? 2 fois, c’est tout. Mais les flics ne voulaient pas me croire. Alors, j’ai fini par dire oui.

Brigitte en a parlé à l’assistante maternelle. C’est quand elle était déjà en famille d’accueil. Si j’avais été arrêté pour ma nièce, j’aurais pas commis d’abus sur Brigitte. Mais je pensais pas que ça arriverait. Je savais bien que je l’avais pas violée. Mais je me croyais tout permis.

Les abus, c’était en 94 . On s’est séparés en 95, mais c’était pas à cause de ça. On s’était séparés parce qu’on ne s’entendait plus. C’était des engueulades tout le temps. Il se passait pas une journée sans qu’on se prenne la gueule. J’étais pas alcoolisé tout le temps, mais quand même, la plupart du temps. Je me rappellerai toujours la séparation. Je suis rentré un jeudi. Le frère à ma copine m’a dit : Chloé, elle s’est barrée avec les enfants, elle revient plus à la maison. Mais je l’ai pas tellement cru. Je suis allé voir chez ma mère. Je me suis dit : ils vont revenir. Mais après 2, 3 jours, là, j’ai compris qu’elle ne reviendrait plus. Plusieurs fois, elle était déjà partie, et chaque fois qu’elle revenait, il y avait des histoires. Je l’ai longtemps attendue. Je pensais pas me retrouver comme ça, tout seul, d’un seul coup. Elle était repartie chez ses parents. Après, y a une assistante sociale qui est intervenue. Chloé s’occupait mal des enfants d’après ce que j’ai compris. Et ils ont été placés dans une famille d’accueil, dans le sud de la Manche, je crois. Les enfants sont arrivés en famille d’accueil en 97.

Je n’avais pas bu quand j’ai commis les abus. Mais je sais que la veille, j’avais bu. Il restait peut-être encore les vapeurs. Peut-être ? Quand on m’a demandé si j’avais fait ça sous l’effet de l’alcool, j’ai dit non. Ce serait mentir de dire que c’était sous l’effet de l’alcool. Par contre, je sais que j’avais bu la veille. Les abus, c’était un matin de bonne heure.

… Je sais pas, mais on culpabilise beaucoup. Je suis souvent tout seul. Je regarde la télé. Je laisse passer les images. Mais je repense à tout ça. Pourquoi j’ai été jusque là ? Il m’a fallu la prison pour comprendre. Pour ce qui s’est passé avec Brigitte, il faut dire aussi que ma copine me tournait le dos. Je l’ai su après, elle me trompait. Mais ça se voyait bien qu’elle ne voulait plus me faire de câlins. C’était terminé. Et moi, je voulais pas seulement des câlins avec du sexe. J’aimais bien aussi la tendresse. Mais elle, pas du tout. Elle était pas câline du tout, du tout, du tout.

Quand je repense à tout ça, je me dis que j’ai le cerveau malade. C’est pas possible ! Quand je vois les autres faire… Bon, c’est vrai qu’on ne sait pas ce qui se passe chez les autres.

Brigitte a parlé des abus à la famille d’accueil, qui a du en parler à l’éducateur. Les gendarmes sont venus un mercredi. Ils m’ont demandé de les suivre jusqu’au poste. J’étais en train de faire le ménage. J’ai dit : Attendez ! Ils m’ont dit : Bon, vous vous présentez après. Sûr ! hein ! J’y suis allé confiant. Je pensais que c’était pour un truc, je ne savais pas trop. Ils m’ont dit : c’est à propos de votre fille, elle vous accuse de viol. Ils m’ont fait vider les poches, tout. Ils m’ont accroché au plot, bon ! J’ai pas reconnu tout de suite. J’étais pas d’accord avec eux. Ils m’ont dit : la gamine, elle sait très bien ce qu’elle dit, ceci, cela. Et comme je savais ce que j’avais fait, j’ai dit oui, mais par contre, quand ils ont parlé de viol, j’ai dit : Non, je l’ai pas violée. Je savais très bien que je l’avais pas violée. Y avait pas de fellation, ni rien. L‘expert psychiatrique m’a dit : vous savez qu’il y a eu viol. J’ai dit : Non, je suis sûr et certain qu’il n’y a pas eu viol. Et par la suite, quand j’ai reçu une lettre du tribunal comme quoi je passais en correctionnelle, c’était donc pas considéré comme viol, mais comme agression sexuelle. J’avais été incarcéré aussitôt après la garde à vue. Juge d’instruction le vendredi matin et aussitôt après, ils m’ont mis en maison d’arrêt.

Ma sœur Claudine a demandé tout de suite à avoir un parloir. Elle est venue au bout d’un mois. Après, ça a été mon frère, et après, ma mère. Mais ma mère, bon, elle commençait à perdre la tête. Elle se rendait pas bien compte. Ma sœur, la première fois, elle m’a dit : t’as quand même pas fait ça ! Je lui ai expliqué comme je l’explique là. Je leur ai dit. Et voilà !

Le jugement, je l’ai vécu très mal. Parce que d’entrée de jeu, le juge m’a dit : « c’est votre jour ! » Et mon avocat n’était pas là. Il est arrivé 5 minutes avant la fin. Je m’attendais quand même pas à 6 ans ferme. Je me suis dit : Ah la vache ! Quand je pense que l’avocat a dit à ma famille après le procès : « il aurait mieux valu qu’il commette l’acte, il aurait peut-être moins pris ». Il faut le faire ! Même ma sœur n’en est pas revenue.

Ça a été difficile à vivre. Après la garde à vue, il y a eu la maison d’arrêt pendant 2 ans et puis le CD. Dur, très dur. Etre enfermé, déjà. Et puis être constamment sur le qui-vive, parce que avec mon histoire, c’est très mal vu en prison. Faire attention à tout, à pas se trouver en compagnie de gars qui vous regardent de travers, parce que… on voit que si ils pouvaient me tuer, ils le feraient ! Aucun bon souvenir de la prison. Y a eu le groupe sur la fin de mon séjour. J’ai eu du mal à y aller. Mais j’ai bien aimé. C’est là que j’ai posé la question de comment réparer, parce que c’est Brigitte qui a repris contact. Moi, je voulais reprendre contact, mais j’osais pas. Je me disais : elle va m’envoyer balader » ou un truc comme ça. Mais c’est elle qui a repris contact. En plus, elle m’a appelé hier. Mais, elle, ça va pas très fort parce qu’elle a pas de boulot, ni rien.

En fait, la reprise de contacts ne s’est pas faite à l’initiative de Brigitte. Lorsque Michel C. a parlé dans le groupe de thérapie de son désir de réparer ses torts auprès de ses enfants et qu’il a envisagé de leur écrire, j’ai pris contact avec le service de placement familial gardien des deux enfants. L’éducateur référent m’a dit que Laurent présentait des troubles psychologiques pour lesquels il était suivi régulièrement par un pédo-psychiatre, et qu’il réclamait son père. J’ai conseillé à M. C. d’écrire une lettre à son fils en l’adressant à l’éducateur (et également une lettre différente à sa fille Brigitte, dont voici un extrait : « …En premier lieu je voudrais te demander pardon et te dire mes regrets pour les gestes déplacés que j’ai eus envers toi. Ton papa n’avait pas le droit de faire des choses pareilles, c’est donc pour cela que je voudrais que tu saches, maintenant que tu es en âge de comprendre, que tu n’es en rien responsable si je suis en prison aujourd’hui. Mais bien au contraire, je trouve que tu as eu raison d’en parler et même si cela te paraît bizarre mais si tu n’avais rien dit, la justice ne serait jamais intervenue et peut-être que ton père aurait fait des choses beaucoup plus graves, alors comme tu peux le voir c’est un service que tu m’as rendu car je profite d’être en en prison pour me soigner pour ne plus jamais refaire des choses pareilles. Quoi qu’il en soit je tiens à te dire que je ne vous oublie pas et que je vous aime toujours, autant sinon plus car malgré cette bêtise que ton papa a faite, vous êtes ce qui m’est arrivé de mieux dans ma vie. Le plus dommage, c’est que ton père a fait l’idiot et de ne pas avoir réagi en homme et papa normal…

…Quand je serai dehors, papa fera tout ce qui sera possible et nécessaire pour refaire une vie normale et ainsi devenir un homme mais aussi un papa raisonnable, sûrement le papa que vous auriez aimé avoir… »

Mais les deux enfants n’ont pas eu connaissance de ces courriers aussitôt. Il a fallu 6 mois pour que ces courriers soient communiqués aux enfants, après que nous ayons pu lever un certain nombre de freins. L’éducateur, tout d’abord, avait des doutes sur l’opportunité de transmettre les lettres du père aux enfants. Il ne semblait pas convaincu que ce fut le père qui ait écrit lui-même de tels courriers. Il était par contre convaincu que Brigitte avait bien été victime de viol, que ce viol avait été correctionnalisé, et que d’ailleurs, d’autres viols avaient été commis et sanctionnés dans cette famille. J’ai proposé de rencontrer l’éducateur et le psychologue du placement familial pour les rassurer sur l’état psychologique du père et sur l’authenticité de sa démarche. La réassurance de l’équipe a permis une mobilisation efficace, mais limitée par d’autres freins. Le service juridique de l’association gestionnaire du Placement Familial a demandé que le Juge des Enfants soit informé afin qu’il donne l’autorisation de transmettre le courrier du père aux enfants. Dans le même temps, j’ai suggéré à M. C. d’écrire lui-même au Juge. Ce n’était pas nécessairement une bonne idée puisque le Service de P.F. a écrit au Juge pour avoir son avis, pendant que le Juge adressait un soit-transmis au service de Placement Familial pour avoir son avis…

Mais entre temps, la psychologue a informé la pédo-psychiatre du projet de communiquer à Laurent un courrier de son père. La pédo-psychiatre s’est alors opposée à tout contact ou information entre le fils et le père : « Cet enfant est schizophrène. Il n’est donc pas dans la réalité. D’ailleurs, en séance, il dessine son père, mais le dessin est destiné au thérapeute et non à son père. Et compte tenu de son état, il aura besoin d’un placement en établissement spécialisé d’ici deux ans ». La même pédo-psychiatre avait expliqué à la famille d’accueil le diagnostic de schizophrénie en signalant qu’un certain nombre de schizophrènes avaient tué leurs parents…

En accord avec l’équipe du placement familial, nous avons décidé de rencontrer cette pédo-psychiatre qui n’a pas du tout apprécié notre intervention. Mais curieusement, l’arrêt de la thérapie est survenu très peu de temps après. Il n’était plus question de schizophrénie !

Le jugement de M. C. comportait aussi un retrait de l’autorité parentale sur sa fille. Il a donc fallu également une autorisation de la mère pour que le courrier du père soit communiqué à Brigitte. Et après un courrier de la psychologue au Juge insistant sur l’importance pour les deux enfants d’avoir accès aux courriers de leur père, ceux-ci ont enfin pu être lus aux enfants, 6 mois après leur envoi. La psychologue qui travaillait avec Brigitte sur son sentiment de culpabilité d’avoir envoyé son père en prison, a pu utiliser la lettre du père pour lui confirmer qu’elle n’était pas coupable de l’incarcération de son père. Mais Brigitte était difficile à convaincre comme en témoigne la réponse qu’elle a alors adressée à son père (orthographe respectée) :

« Chère papa adoré,

Tu me manque j’ai reçu ta lettre je t’aime de tout mon cœur mais en premier lieu ton pardon je l’accepte et tes regrets aussi. Maman parle du mal sur toi elle dit « oui ton père t’a fait du mal sur toi » moi j’ai dit « en fait s’est pas sa faute s’est ta faute ». Toi tu es pour rien c’est la faute de maman. Elle qui est partie chez mamie. Papa est ce que maman est vraiment notre maman parce que moi je ne crois pas. Toi tas les même yeux que moi et Laurent Ta le même nom de famille que nous, car maman elle la les yeux marron et que son nom famille est J. Laurent et moi on veut savoir. Je suis sage avec tata et tonton. Que dieux te protége du mal. Papa etceque je peu t’appeler papounet. C’est moi qui aventer et je t’offre ce cadeau pour la fête des pères. Bon aller je te laisse.

Ta petite fille que tu l’aime

Brigitte ».

Extraits de la lettre-réponse du père à Brigitte :

« J’ai bien reçu ta lettre qui m’a fait énormément plaisir… Maintenant en ce qui concerne la question que vous vous posez au sujet de votre mère la réponse est oui. Elle est vraiment votre Maman tout comme je suis votre papa ou si tu préfères ton papounet . cette décision de m’appeler comme ça me plaît beaucoup, je trouve ça très joli et sympa de ta part… Tu me dis que toi et ton frère étiez sages. C’est bien, je suis fier de vous deux. Tâchez de le rester avec tonton et tata car je sais qu’ils s’occupent très bien de vous, ainsi que Dieu , lui aussi, veille sur nous tous. Je souhaite que vous restiez sages et aussi gentils avec votre maman car même si elle dit du mal sur moi, cela n’est pas grave, un jour peut-être elle se rendra compte qu’elle avait tort de vous parler de moi comme ça, il faut lui laisser du temps. Pour l’instant ce qui compte le plus c’est votre sécurité et votre éducation car cela est très important… »

Après avoir pris connaissance de ces courriers, les deux enfants ont été très émus, ont posé des questions sur la situation du père. La fille a pu dire sa satisfaction de savoir que son père bénéficiait de soins. Les deux enfants ont demandé à répondre à leur père. Mais après le courrier écrit par Brigitte, la pédo-psychiatre qui ne peut supporter la reprise de contact est intervenue auprès du Juge pour Enfants et le droit de visite du père (sorti de prison en fin de peine en novembre 2001) est resté suspendu jusqu’à ce que la psychologue du Placement Familial insiste pour demander la mise en place d’entretiens médiatisés entre le père et chacun des enfants. Elle demandait surtout que Brigitte puisse bénéficier d’un tel droit de visite médiatisé afin de traiter sa culpabilité d’ « avoir envoyé son père en prison ». Mais Brigitte n’a pas répondu à la demande du magistrat d’écrire ses motivations pour une telle rencontre avec son père. Elle avait dit au Juge son désir de revoir son père et n’a pas estimé nécessaire de l’écrire. Les visites n’ont donc pas eu lieu. Et Brigitte a coupé toute relation avec la psychologue du service. Par contre, Laurent a eu l’autorisation de bénéficier de rencontres médiatisées. La première rencontre a ainsi pu avoir lieu deux ans après la sortie de prison du père. L’éducateur, inquiet de cette rencontre avec un père abuseur, avait souhaité ma présence. Michel C. et son fils Laurent ont alors pu se voir en présence de l’éducateur, de la psychologue et du psychologue du père. Et Laurent a pu nous dire dès le début de cette première rencontre : « Ça fait deux ans que j’attends ce moment-là ». J’avais demandé au père d’apporter des photos pour aider son fils à retrouver des souvenirs, puisqu’ils ne s’étaient pas vus depuis 5 ans, Julien n’ayant que 3 ans lors de la séparation du couple. Michel C. a apporté une photo du dernier Noël passé en famille, mais avec seulement le sapin décoré et les jouets au pied du sapin. Je craignais que cela n’évoque rien pour Laurent. Or, à ma grande surprise, Laurent s’est montré très heureux de reconnaître les cadeaux, le camion de pompiers de ce Noël, et aussi… le papier peint de la salle qu’il déchirait régulièrement. Laurent a commencé ainsi à reconstituer le puzzle de son histoire, ce qui s’est continué lors des séances suivantes. Ces rencontres médiatisées, mensuelles ou bimestrielles, dans les locaux du service de placement familial, ont duré trois ans. Une nouvelle décision du juge des enfants a permis que ces visites ne soient plus que « partiellement médiatisées », c’est-à-dire avec la présence des intervenants (l’éducateur et moi-même) au début et à la fin de la rencontre qui pouvait donc se faire à l’extérieur des locaux du service. Et là, la réaction de Laurent a été « Ça fait du bien de ne pas avoir les caméras de surveillance avec nous » ! Peu après, il a demandé l’arrêt de ces visites. Il semble bien que la présence des trois observateurs, contrôleurs du père, et du fils, lui soit devenue difficile à supporter. Il a pu dire qu’il se sentirait mieux s’il avait un contact direct avec son père sans intermédiaire. On peut en effet s’interroger sur le message que l’on adresse à l’enfant en lui imposant la présence de ces « gardes du corps ». N’est-ce pas lui dire implicitement que son père est un homme dangereux ? Est-ce ainsi que l’on peut restaurer une relation de confiance entre un père et son fils ?

A ma sortie de prison, j’ai logé avec mon frère Alain, chez lui. Je sortais pas beaucoup. J’ai toujours peur de faire des mauvaises rencontres. Même maintenant. J’ai toujours peur de me faire insulter. Ce qui est arrivé encore tout récemment. J’allais chercher mes cigarettes un matin de bonne heure, j’étais en train de parler avec un gars, et une ancienne connaissance m’a encore traité de pédophile.

Le logement de mon frère, le propriétaire a dit qu’il voulait le revendre. On est partis, mais c’est toujours resté tel que c’était. Mais c’est pas plus mal qu’on soit partis de là parce que l’alcool, tout, c’était la débandade complète. Ça déboulait là-dedans à 2, 3, 4 heures du matin. Mon frangin, il n’en pouvait plus. Il ne pouvait même plus dormir.

Alors, on est revenus tous les deux habiter chez notre mère, pendant pas mal de temps parce qu’on s’est retrouvés sans appartement. Moi, j’avais rien. Et en plus, notre mère avait la maladie d’Alzheimer, alors, on se relayait mon frère et moi pour la garder. C’est quand j’ai connu Paulette que j’ai pris un appartement juste à côté. Mais entre nous, ça n’a pas collé. Paulette, c’est une femme que j’ai connue après la prison. Ça n’a pas marché. On est restés trois semaines ensemble. Elle me disait que c’était fini avec son mari. Et après, j’ai appris qu’elle était toujours avec lui. Et puis, y a aussi ce problème. Ça aussi, c’est pas facile d’en parler. Mais je vais vous le dire quand même. C’est le problème de rapports sexuels. J’ai un tablier graisseux. J’ai été voir un urologue. Il m’a dit : votre sexe est parfaitement normal, mais c’est votre tablier graisseux qui vous empêche d’avoir des rapports normaux. Alors, ça m’a redescendu encore une fois. Alors, j’ai dit à Paulette : on en reste là. On est toujours amis, mais c’est tout. Et maintenant, je suis bien ici.

Brigitte a repris contact par téléphone avec son père il y a deux ans. C’est son frère Laurent qui lui avait communiqué le numéro de téléphone de son père. Puis, elle est venue le voir, et, plus récemment, Laurent aussi est revenu voir son père.

Brigitte et Laurent, ils ne portent pas bien haut l’éducateur, M. Joubin, dans leur cœur. Apparemment, il était très strict. Brigitte m’a dit : « faut voir tout ce que M. Joubin a dit sur toi, tout ça ». Elle n’a pas de bons souvenirs de M. Joubin, Laurent aussi.

Il ne supportait pas de venir me voir à la journée et de repartir le soir avec la nourrice. Il me l’a dit encore il y a pas longtemps. Ça lui convenait pas qu’on le dépose le matin et qu’on le récupère le soir. Il aurait voulu rester plus longtemps. Il me le disait à chaque fois qu’il venait. Il aurait voulu rester avec moi. Je pouvais pas, vis-à-vis de l’assistante sociale. Il regardait l’heure : « ah bon, je vais pas tarder à repartir, je voudrais bien rester avec toi ». Et après, il a coupé tous les ponts avec moi.

Brigitte a quitté la famille d’accueil le jour de ses 18 ans. Ça fait 4 ans de ça. C’est Brigitte qui a repris contact avec moi. Ça, c’était bien avant mon coma éthylique. Un jour, elle m’a appelé au téléphone. Sa mère aussi m’a appelé, et elle m’appelle encore de temps en temps. Là, je comprends pas bien. Mais je veux pas d’histoires. Elle m’a téléphoné pour prendre de mes nouvelles. Ça paraît bizarre quand même. Surtout que au début, quand Brigitte est revenue chez elle, elle m’avait écrit pour que je lui paie une pension. Plus tard, au téléphone, elle insistait pour me voir. J’ai même cru qu’elle voulait reprendre des relations avec moi, alors qu’elle vit avec un copain et qu’elle a eu un enfant avec lui.

Brigitte est venue me voir il y a deux ans. Sa mère l’avait déposée devant chez moi. Quand je l’ai vue, ça me faisait tout drôle de l’avoir quittée à 9 ans et de la revoir là à 22 ans. Je ne l’ai pas reconnue. Elle, elle m’a tout de suite reconnu. On s’est embrassés. J’avais bien vu quelqu’un qui cherchait la maison. Je suis sorti tout de suite quand j’ai compris que c’était elle. Après, elle m’a téléphoné souvent. Elle m’a encore appelé hier. J’avais le cafard depuis la veille. J’avais envie de les voir tous les deux.

Laurent, il a eu son bac pro. Il cherche du travail, un stage. Et il va reprendre ses études pour faire un BTS, dans le commerce, je crois. Il m’appelle de temps en temps. Il a bien changé. Il est mieux. Il a la tête sur les épaules. Je lui ai dit : heureusement que t’as changé. Il le reconnaît : j’étais pas comme ça quand j’étais jeune. Il m’a rappelé qu’il bousillait tout. On voit bien qu’on peut tenir des conversations avec lui. Ils sont venus au moment de Noël. Et là, pendant que j’étais à la clinique, ils sont venus tous les deux voir Alain pour voir au cimetière où c’est qu’était enterrée ma mère. Ils ont été tous les deux sur la tombe. Je les ai pas vus, puisque j’étais pas là.

Brigitte vit toujours dans un foyer de Jeunes travailleurs à Angers, non, à Cholet.

Laurent était interne dans un lycée au Mans. Mais ça lui plaisait pas. Il a arrêté, et là, il vit chez sa mère à Angers aussi.

Quand j’étais en clinique, c’est leur mère qui est descendue d’Angers et qui les a emmenés tous les deux. Elle est allée dans sa famille, mais il y a toujours des histoires. C’est ce que m’a dit Brigitte : « Du côté de ta famille, ça va. Mais du côté de maman, c’est toujours compliqué ».

Chloé ne travaille pas. Elle élève son petit gamin. C’est un demi-frère pour Brigitte et Laurent.

J’ai souvent envie de parler de tout ça, mais je sais jamais à qui m’adresser. Avec ma sœur, oui, ça va encore. Elle m’a toujours beaucoup soutenu, même si elle a bazardé mes maquettes ! mais c’était des nids de poussière, alors elle a tout balancé.

Avec Brigitte, on a reparlé de tout ça. Le jour qu’elle a repris contact avec moi, elle m’a demandé pardon. Moi, je lui ai répondu : c’est plutôt à moi de te demander pardon. Elle m’avait demandé pardon, je sais pas de quoi. Sûrement sur le fait de m’avoir envoyé en prison. Apparemment c’était ça parce qu’elle y avait déjà fait allusion. Elle m’a dit qu’elle m’a pardonné. Alexandra aussi, quand je lui ai demandé pardon. Elles m’ont pardonné. Ce qui reste, c’est que moi, j’arrive pas à me pardonner ce que j’ai fait.

La dernière hospitalisation, l’an dernier ?

Là, je dis que j’ai pris l’apéro avec la mort. C’est resté gravé !. La veille, j’étais pas bien. L’infirmière qui me fait tous les jours ma piqûre pour le diabète était sur le point d’appeler les pompiers. Je lui ai dit : non, ça va aller, ça va aller. Mais je sentais bien que ça allait pas. J’avais déjà le diabète. Mais là, c’était par rapport à l’alcool. J’ai pu avoir un rendez-vous chez le médecin. Quand il m’a vu, il a dit : direction l’hôpital, tout de suite. Et quand je suis arrivé là-bas, je me rappelle d’avoir dit à mon frère d’appeler le curé, parce que pour moi, c’était la fin. Y avait pas de problème. Je me suis dit en moi-même : je vais pas m’en sortir. Là, je suis tombé, je sais pas si c’est un coma, un delirium ou quoi… j’étais enfermé dans une pièce noire. Je voyais des arcades, comme ça. Y avait des infirmières. J’appelais, j’appelais et je me disais en moi-même : Ben non, ils ne peuvent pas m’entendre puisque je suis mort. Ça m’est resté marqué, ça. Après, c’était du délire, du delirium, ce que je faisais. J’étais avec ma sœur, Claudine. Elisabeth était là aussi. Y avait comme une sorte de dôme. Et y avait des gens qui travaillaient. Ça grouillait dans tous les coins. Et puis y en avait qui mouraient. Y en a qui arrivaient et qui remplaçaient les morts. C’était assez mélangé. C’est difficile à expliquer. Et rien que d’en parler, je revois les images. Petit à petit, ça a été mieux. Claudine est venue me voir. Elle m’a dit : on a bien vu que t’étais pas là ! Elle me parlait. J’avais l’impression d’être attaché à un poteau et y avait une porte battante devant moi qui se refermait pas. Et y paraît que j’ai dit à ma sœur : je vais repartir dans ma cellule,. Elle m’a dit : c’est là qu’on s’est aperçu qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. ? Est-ce que c’est le fait de la prison ? la cellule ? Après, ça s’est calmé.

Tout a changé depuis. Et surtout après ma cure d’amaigrissement à la clinique. J’ai repris un bon rythme. Je mange équilibré. Je fais de la marche. Je me sens nettement mieux. Avant, déjà, ça allait, mais j’avais tendance à me réenkyloser, tout ça. Je voulais plus sortir. J’avais fait plusieurs cures de désintoxication. Mais y a eu des rechutes. Et j’ai eu souvent des idées de mourir. Là, avant l’hôpital, je sais que c’était comme un suicide programmé. Je savais que je risquais ma peau. Je prenais mes médicaments et je prenais de l’alcool avec. On m’a dit : on voyait bien que tu te suicidais à petit feu. J’avais peur de la mort mais je m’en foutais. J’arrivais plus à rien. Et quand on a le dégoût de tout, c’est infernal.

Depuis l’hospitalisation, où j’ai vraiment frôlé la mort de près, j’ai demandé à Dieu de me pardonner de tout ce que j’avais fait. J’ai plus d’angoisse de nuit, choses que j’avais depuis l’âge de 12 ans. Quand je voyais la nuit arriver, c’était un calvaire pour moi. ? Et là, je ne suis plus angoissé la nuit. Je commence à ne plus avoir la crainte de la nuit. Petit à petit, je vois des choses qui disparaissent de ma vie, comme les grossièretés. J’évite d’en dire.

La peur de la mort est disparue aussi. J’appréhende la mort, mais j’ai pas peur de la mort. Je pense qu’avec tous ces trucs là qui me permettent de… Là, j’ai ma bible, j’en ai même deux !. J’ai mes notes que je lis tous les matins. Je sens qu’il y a un mieux. Et de revoir mes deux enfants, même si c’est pas souvent, ça me motive. Ils sont adultes tous les deux maintenant, et je retrouve un peu un rôle de père. Je voudrais bien qu’ils soient avec moi pour qu’on aille se balader ensemble et pour qu’on discute ensemble.

Bien souvent, c’est eux qui m’appellent. C’est plus facile parce qu’ils ont les appels illimités dans leurs forfaits. Alors, quand je sais pas trop quoi faire et que j’ai envie de les entendre, j’appelle, je prends de leurs nouvelles et ils me disent qu’ils vont me rappeler.

Maintenant, c’est passé, tout ça. Mais tout ça, ça m’est resté marqué.

Après sa sortie de prison, et sa reprise de consommation d’alcool avec son frère Alain, Michel C. na pouvait envisager de soigner cette dépendance tant il avait peur de l’hôpital, des piqûres et des soins en général. Il a fallu que son frère se lance dans une cure de désintoxication pour qu’il accepte de se soigner lui aussi. Il a alors découvert un milieu hospitalier chaleureux, maternant et qui le reconnaissait pour ce qu’il était, un homme en souffrance. Et il accepte maintenant les piqûres quotidiennes pour soigner son diabète. Il a connu plusieurs rechutes d’alcoolisation, plusieurs hospitalisations, mais c’est après avoir « pris l’apéro avec la mort » qu’il a décidé de ne pas aller plus loin dans ce comportement tout à fait suicidaire. Et il a acquis aujourd’hui une relative sérénité, renforcée par la reprise de contacts avec ses deux enfants.

Il me restait un doute. L’éducateur des enfants croyait que Brigitte avait été victime de viols (donc avec pénétration sexuelle), et que ces viols avaient été correctionnalisés, et que donc Michel C. avait été jugé seulement pour agressions sexuelles. Il est vrai que la sévérité de la condamnation (6 ans de prison correspondent presque au maximum de la peine encourue pour agression sexuelle) et le retrait de l’autorité parentale sur la victime pouvaient conforter cette idée. Et je n’avais pas eu l’occasion d’avoir connaissance du dossier pénal. Mais j’ai eu la possibilité, après avoir ainsi interviewé Michel C., de rencontrer récemment sa fille Brigitte qui a accepté de me recevoir. Et elle m’a assuré que l’expertise qu’elle avait subie après avoir révélé les faits avait confirmé qu’elle n’avait pas subi de pénétration. Elle m’a aussi affirmé que tous ces évènements l’avaient finalement « aidée à avancer », ce qui s’appelle la résilience. Mais nous reviendrons plus longuement ultérieurement sur cette entrevue avec Brigitte, et sur les nouvelles relations qui se sont établies entre le père et sa fille.

Michel Suard

ATFS Caen, 6/08/16

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